Emmanuel Viard
Point de départ de mes nouvelles sculptures : des photographies de la ville imprimées sur Alumium faisant partie de l’accrochage. Par la photo je m’approprie un lieu, une architecture, un jeu d’ombres ou de reflets. Une matière peut avoir un effet électrochoc, un rapport de couleurs m’attirer et m’inspirer.
Pour «According to what and M.S.», je suis parti d’une série de photos prises sur la durée, d’un chantier dans le 20ème arrondissement de Paris à côté du Théâtre de la Colline. Sur l’ensemble des photos, j’en sélectionne une. Agrandie, collée sur bois, recouverte d’une plaque de plexi, boulonnée, mon travail de sculpture peut commencer. J’interviens par le dessin, la gravure, la couleur. De ce plan qui deviendra vertical fixé sur un mur (Munie) je vais au-delà de ce que je vois. De cette surface lisse brillante figurative, j’élève une composition, une construction éclatée, pourquoi pas une scène théâtrale qui pourra même déborder largement du cadre de la photo : c’est le Photo-Murile. La musique a son importance, participe à mes compositions, à mes choix plastiques. La façon dont s’agencent les couleurs, se forment les matières, naissent les différents plans, leur dialogue, n’est pas dissociable de la musique qui m’accompagne à ce moment-là.
Parallèlement à l’élaboration du Photo-Munie, je dessine sur le lieu choisi, l’association du dessin et des photos prises aboutira à un «Dessin-Structure». Dans l’exemple d’ «According to what and M.S.», la déconstruction par le dessin et la photo va se voir dans le temps.
Dans le même temps, je mets en scène, dans le triptyque ou la structure animée, les dessins, les esquisses, les directions envisagées pour le «Photo-Murile». Celui-ci achevé ou arrêté, offre un nouveau voyage, une nouvelle lecture. Cette structure animée où j’interviens avec différents matériaux, fait surgir des passages, des circulations, une composition qui peut informer, cacher, divulguer, affirmer ou repousser, suivant la position des parties mobiles. Ce «Structure-Dessin» ferme la boucle, c’est l’aboutissement du «Photo-Murile». Il regarde déjà en avant, pointé vers le futur, lien entre ce «Photo-Murile» et la nouvelle photo, nouvelle porte ouverte.
Dans cette exposition, vous pouvez voir pour chaque photo choisie, le «Photo-Murile», le «Dessin-Structure», le «Structure-Dessin» qui lui sont associés, présentés sur des portiques en bois.
Laissez-moi partager avec vous cette réflexion de Pierre Soulages , découverte à l’occasion de la vue de ses vitraux créés pour l’église Sainte-Foy de Conques : «La réalité d’une œuvre, c’est le triple rapport entre moi qui l’ai faite, la chose telle qu’elle est, avec les sens qui viennent se faire et se défaire sur elle, et celui qui regarde».
Emmanuel VIARD, le 17 mars 2012