Arman : Accumulation d’objets récupérés, matériaux, déchets de la société
Après avoir étudié à l’Ecole nationale des arts et fréquenté l’Ecole du Louvre à Paris Arman débute en 1955 avec une série de toiles abstraites, les cachets nominatifs une œuvre exposée au Muséum Ludwig à Cologne, il fait parti de l’œuvre précoce informel de l’artiste. Avec la fondation des « Nouveaux réalistes en 1960, Arman évolue vers un style inédit. Le groupe d’artistes autour du critique d’art Pierre Restany adopte Arman pour ses accumulations.
Avec Yves Klein, Jean Tinguely, Daniel Spoerri, Martial Raysse. Arman s’intéresse aux matériaux banals de la société de consommation, s’efforce de faire s’interpénétrer l’art et la vie et reprend les idées du Dadaïste. Poubelle est l’une des premiers travaux de la nouvelle phase. Le vrai matériau pour son art, Arman trouve dans les déchets, dans les bennes d’ordures dont il remplit le contenu dans des réservoirs en plexiglas sans les trier ou leur donner un ordre formel. Le contenu social de ces œuvres est différent selon qu’il provient des détritus d’un foyer bourgeois ou qu’il a été déniché par exemple dans les poubelles des Halles. Arman réalise de la même manière les « portraits » de ses amis en prenant possession de leur corbeille à papier contenant pour lui les objets-clés de leur personnalité. Arman dit lui-même « j’affirme que la force d’expression des ordures et des objets inutilisables constitue déjà une valeur en soi de manière tout à fait directe, sans rechercher de formes esthétiques dans les déchets, ce qui les brouillerait et les comparerait aux couleurs d’une palette. C’est en 1961 qu’il réalise Accumulation de brocs, des objets réels du quotidien, à savoir des brocs en émail des diverses couleurs, présenté sur deux rangés doubles devant un fond aveugle. Les brocs, objets récupérés et maintenant libérés de leur fonction utilitaire, sont mis clairement en évidence derrière une vitre, leur valeur spécifique est établie.
Pour le traitement des objets
Arman adopte un position radicale : il est le premier à accepter la réalité et à l’utiliser comme elle est. Il ne cherche ni l’idéalisation, ni l’élévation et la transfiguration de la réalité, mais la réalité même. Les brocs d’eau ne représentent pas seulement des brocs d’eau, ce sont des brocs d’eau.
L’oeuvre Carton avec renforts (1964) se base sur une idée de 1961, car Arman à cette époque le carton aux ressorts en spirale chez les « pèlerins d’Emmaus » à Nice. En restaurant l’objet que vient juste d’acquérir en 1967 le wallraf-richartz-Museum, Arman unit des feuilles et des pierres de Nice et de Cologne dans le morceau de résine marron du carton collé sur le bois peint en blanc. Par le choix de son titre, l’artiste donne un exemple des multiples associations possibles d’objets utilitaires.
Sculpture
La sculpture Torse aux gants fait partie d’une série de six oeuvres très similaires dans lesquelles des objets à chaque fois différents (par exemple des morceaux de violon) sont pris dans le moule coulé en polyester d’un buste. La double fragmentation des formes corporelles dans ce cas – torse et mains en plastique de mannequins de vitrine- provoque un effet surréel sur le plan de la forme comme du contenu : le motif traumatique de l’attouchement multiple est transformé à l’intérieur du corps féminin. Le buste en polyester à l’aspect volontairement esthétique se distingue par sa force d’expression directe et non équivoque, des oeuvres antérieures, au premier abord difficiles de l’artiste. De par son effet suggestif puissant, le torse de femme est proche des tendances artistiques du Pop Art américain de la même époque.
La démarche et l’oeuvre d’Arman est décrite dans l’article qui a été publié lors de sa rétrospective au Centre Pompidou du 22 septembre2010 au 10 janvier 2011. voir
La créativité d’Arman ne connaît pas de frontières. Chacune de ses oeuvres est l’occasion d’aborder le quotidien sous un angle novateur et nous incite à réfléchir sur l’essence-même de l’art.
La série Nec Mergitur (il ne coulera pas), datée de 1998, se situe à mi-chemin entre peinture et volume. Arman abandonne les accumulations et concentre son attention sur l’objet en tant qu’entité pour l’immerger dans la matière. L’emploi de couleurs ternes exprime son incompréhension devant le ravage des marées noires.
Marcelin Pleynet retrace le parcours singulier et exemplaire d’un artiste qui a su préserver sa liberté tout en libérant la peinture. Car Arman est peintre avant tout. Ses oeuvres reposent sur une résonance poétique et une intelligence fertile. Elles témoignent d’une rencontre entre la sensibilité du créateur et les grands événements de notre siècle.
Dans son entretien avec Tita Reut, Arman nous confie les clés de Nec Mergitur.
Cet ouvrage, il a été tiré 250 exemplaires numérotés de 1 à 225, 15 exemplaires H.C., 10 exemplaires E.A., accompagnés pour chacun du » naufrage d’un gant « , qui constituent l’édition de luxe.