Braque et Picasso la possession des choses avec le Cubisme
En tant que cofondateur du cubisme auquel il restera lié toute sa vie, Georges Braque n’acquiert la popularité qui lui revient que relativement tard. C’est tout d’abord l’amitié avec Raoul Dufy qui l’amène à partir de 1905 dans le cercle des «fauves» rassemblés autour d’Henri Matisse. En 1907, il rencontre pour la première fois Pablo Picasso qui vient alors d’achever son célèbre tableau Les Demoiselles d’Avignon, introduisant les développements du cubisme.
Encore fortement influencé par Paul Cézanne, Braque peint en 1908 à L’Estaque sa première toile cubiste. En novembre de la même année, Braque expose à Paris dans la galerie du jeune Daniel-Henry Kahnweiler qui deviendra le forum du cubisme.
Dans le cubisme analytique qu’il développe avec Picasso, Georges Braque est animé du désir de «prendre complètement possession des choses». Les formes cubistes éclatent en morceaux et se cassent en surfaces échelonnées quasiment cristallines. «Lorsqu’en 1909, les objets apparaissent sur mes toiles, il me devint possible de me rapprocher d’un objet autant que la peinture le permettait» (Braque).
J’ai fait entrer la sculpture dans la toile ; ça a été mes premiers papiers collés. Avec ceux, la couleur m’est revenue d’un coup, je n’avais plus à forcer. Le combat y était toujours, mais il se passait sans moi, sur la toile.
Espace et volumes sont constitués chez Braque non par l’utilisation de la perspective, mais uniquement par la multiplication des aspects, car un phénomène essentiel du cubisme, réducteur de l’espace et du temps, est la présentation simultanée de plusieurs vues d’un objet. Depuis le printemps 1912, Braque choisit l’ovale «pour ses tableaux […] le format ovale qui évite la cassure rectangulaire et qui confère à la surface de la toile un caractère plus fermé et une oscillation intérieure sensible» (Jean Leymarie). La composition ovale Verre, violon et papier à musique (1912) montre non seulement que les artistes cubistes aiment représenter les instruments de musique, mais qu’ils ont aussi une préférence marquée pour le gris et l’ocre de la phase analytique. Vers 1912-1913 débute la phase synthétique du cubisme qui consiste en une fusion des objets réels avec des compositions abstraites. En août 1914, la guerre entraîne la séparation de Braque et Picasso. Braque est grièvement blessé en 1915 et ne reprend la peinture qu’en 1917, après une longue période de convalescence. « Je m’efforce de tenir compte de la nature, non de la copier», avec ce propos, l’artiste caractérise exactement cette phase créatrice qui débute. Son style qui conserve tout d’abord le caractère de collage, devient plus autonome, les toiles plus colorées, plus picturales et plus proches de la réalité. La nature morte cubiste devient son motif préféré. Le tableau Pichet, citrons, compotier date de la période de création de 1924-1928 au cours de laquelle Braque commence à agrandir l’élément spatial et découvre «jusqu’où on peut aller dans l’union du volume et de la couleur» (Braque). Il constitue l’un des quatre tableaux de même format qui servit de modèle pour les mosaïques réalisées pour le collectionneur Paul Rosenberg.
Edward Fry le cubisme Edition la connaissance